In Fine - Stéphane Nolhart
La Mort est dans notre imaginaire la seule inconnue dont nous ne pouvons refuser l’étreinte quand elle le désire. Mais que savons-nous d elle ? Rien ou presque.
Cette confession exclusive révèle au monde ce qu’aucun historien, ni chercheur, ni médecin n’a jamais pu dévoiler : la Mort a un nom : Catule, de sexe masculin et fan des Beatles. cruciverbiste passionné.
Catule la Mort déprime. Il se sent mal-aimé par l’humanité, supplanté dans le coeur des hommes par la médecine et ses rêves grotesques de vie éternelle. Alors, la Mort décide de se mettre en grève et d’organiser une sensationnelle opération de communication planétaire pour instaurer un monde où il sera enfin reconnu d’utilité publique, adulé comme une star.
Convenons-en d’entrée de jeu, il faut une sacrée dose d’imagination, un vrai talent et une solide obstination pour mener à bien ce face à face Catule, la Mort versus Asclépios, dieu de la médecine. Un choc de titans. Ils ont beau se détester, avoir un job foncièrement différent, leur clientèle est identique. La mort dans l’âme, ils sont amenés à partager la même table pour négocier. Un G 2 oserais-je dire.
Mettons-nous un instant à la place de la Mort. Qui, mais qui, à part quelques très allumés du cortex, songerait à envoyer un mail ou un message sur Facebook à la Mort ? Du genre, Bonjour La Mort, je tenais à vous dire merci pour avoir envoyé ce camion fou écraser ma petite sœur. Bien vu. Lol
Salut la Mort, Finement joué que cette arête de poisson négligemment glissée dans la panade de mon petit dernier. Lol.
La Mort est donc bien seule. Sans compter que les hommes ont inventé l’euthanasie. Si ça n’est pas marcher sur ses plates-bandes ! C’est carrément faucher avant elle, une provocation, une déclaration de guerre !
Dans un premier temps, la Mort, après en avoir avisé la médecine (quel savoir-vivre), décide de ne plus s’attaquer aux octogénaires. Plus aucun mortel dans cette tranche d’âge ne passe de vie à trépas. Si on y réfléchit bien, ça en fait quand même un fameux paquet. Les maisons de repos sont rapidement débordées, plus aucune admission possible, le personnel meurt avant les pensionnaires, bref, c’est le bordel. Sans compter les magasins de pompes funèbres qui mettent le linceul sous le paillasson, les fonds de pensions en faillite. Aux États-Unis, dans les parcs, les vétérans de la guerre d’Irak sont plus nombreux que les pigeons.
Mais à la période d’euphorie succèdent le doute et la culpabilité. Ai-je bien fait, s’interroge chaque jour Catule en voyant les vieux qui enjambent les balustrades du Golden Gate Bridge pour tenter de se noyer dans la baie, qui cherchent une branche d’arbre libre dans un jardin de Séoul pour essayer de se pendre. Mais il est un peu tard pour avoir des états d’âme, d’autant que cette gigantesque opération de séduction est orchestrée par Maître Jacques Vergès en personne, rapatrié de l’au-delà pour l’occasion.
Ce roman de 168 pages est un vrai délice. L’auteur manie l’ironie douce et moins douce, marrie l’humour et le caustique. Je me suis laissé mener en bateau par cette fable, cet essai déroutant, délirant et hilarant. La mort peut-elle être un livre de chevet ? Je botte en touche et me contente d’un Pourquoi Pas ?
Je remercie mon ami blogueur Pierre Faverolle que tout le monde ici-bas connaît pour m’avoir proposé cet ouvrage. La mort a un prix : 7,80 € TTC, non inclus cercueil, couronne et autres accessoires.
In Fine
Stéphane Nollart
Rouge Sang Éditions
168 pages