Ad vitam aeternam - Thierry Jonquet
La couverture est moche, très moche. On dirait un proche parent de Monsieur Propre. Je m’étais dit que j’en comprendrais le choix après avoir lu le livre mais non.
Dans le style rigoureux à l’extrême qui est le mien, je vous livre le résumé, en réalité, la quatrième de couverture.
Anabel a vingt cinq ans. Elle travaille dans une boutique où l'on pratique le piercing, ainsi que d'autres techniques d'implants corporels beaucoup plus hard. Elle se lie d'amitié avec Monsieur Jacob, un étrange propriétaire de magasin de pompes funèbres. Au même moment, un vieillard nommé Ruderi va être libéré de prison après quarante années de détention. La fillette qu'il a mutilée est devenue une femme qui, clouée sur son fauteuil roulant, ne rêve que de vengeance. Elle fait appel à un tueur professionnel, Oleg, pour le pister dès sa libération. Oleg va découvrir le lien étrange qui unit Ruderi et Monsieur Jacob, un secret très lourd, insensé, qui est le grand personnage de cette histoire, ainsi que la Mort, dont la vitalité est à toute épreuve.
J’aime énormément et vous aussi très certainement « …La mort dont la vitalité est à toute épreuve ». Epatant, à conseiller au clergé dans le cadre d’oraisons funèbres.
Moi qui n’y connais rien en piercings et tatouages, à part les quelques décalcomanies indolores de ma prime jeunesse, j’ai trouvé chez Anabel une merveilleuse initiatrice.
J’ai donc appris ce qu’était dans le jargon, après vérification dans Wikipédia, ce qui suit : « la apadravya, comme le ampallang , est un perçage qui traverse le gland. Tandis que la ampallang traverse horizontalement le gland, la apadravya traverse verticalement le gland de haut en bas, presque toujours placé au centre et passant par l' urètre . Décentrées apadravyas sont également possibles, dans lequel le perçage est délibérément décalé, mais en général passe encore à travers l'urètre. Le piercing se fait souvent sur un angle légèrement vers l'avant au niveau des hanches ».
Pour satisfaire votre curiosité que je devine insatiable, j’ai pris au hasard sur un forum l’avis d’un heureux percé : « Le mien ne passe pas l’urètre il est juste au dessus.
Pour la douleur, c'est assez douloureux, à mes yeux c'est le plus douloureux que j'ai fait. C'est douloureux et long à percer en plus.
Pour ce qui est du fait d'être circoncis je ne pourrais pas te répondre, mon anatomie fait que sans l'être mon gland est à "l'air ».
Si non je te conseille ce piercing il est vraiment sympa. Tant esthétique que pratique ».
A mon sens, ça doit faire mal, très mal. Le percé comblé ne dit-il pas : « pour la douleur, c’est assez douloureux, à mes yeux, c’est le plus douloureux que j’ai fait. C’est douloureux et long à percer en plus.
Pour ce qui est des prix, ne me demandez rien, de grâce ! Pour vivre heureux, vivons émasculés, telle est devenue ma devise.
Cela, c’était pour la mise en bouche. Thierry Jonquet nous campe des personnages formidables, des personnages hors normes, extrêmes hormis Anabel, jeune femme ordinaire, marquée par la prison et surtout par la mort de son truand de petit ami. Par sa banalité, elle donne énormément de relief aux autres figures du roman.
Le secret qui lie Monsieur Jacob au taulard Ruderi est le nœud de l’intrigue, ou plutôt le thème essentiel du roman. Mais je ne peux vous en dire plus, sous peine de vous dévoiler trop d’éléments. Car l’une des forces de l’auteur est de nous amener petit à petit, très doucement et à son rythme à ce qu’il veut réellement nous faire partager.
Il n’est pas nécessaire de le dire mais je le dis quand même : l’écriture de Thierry Jonquet est un régal, la langue française est d’une beauté et d’une richesse incroyables quand elle est maniée avec une telle maîtrise et un tel talent.
Cela fait un bien fou.
Après « Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte » et « Mygale », je poursuis ma découverte d’un auteur qui, selon moi, est un tout grand écrivain.
Ad vitam aeternam
Thierry Jonquet
Collection Points
350 pages